« La complexité du financement des associations : Regards croisés de sociologues »

Alors que le financement public de la Ligue des droits de l’homme fait la une des journaux depuis quelques semaines, il est important de rappeler que cette question est loin d’être nouvelle dans le monde associatif. En effet, depuis de nombreuses années, les sciences sociales se sont intéressées à l’équilibre fragile entre autonomie des associations et tentation de contrôle par la puissance publique.

Dans une Carte blanche publiée dans Le Monde, Anne Bory, maîtresse de conférences en sociologie à l’université Paris-Est Créteil, revient sur ces travaux et souligne l’importance de préserver l’indépendance des associations face aux pouvoirs publics.

Elle rappelle notamment que le mode de financement des associations a évolué au fil des ans. Si au départ, la plupart des associations étaient financées par des dons privés, aujourd’hui, la part des financements publics s’est considérablement accrue.

Si cette évolution est souvent perçue comme une opportunité pour les associations, qui peuvent ainsi disposer de moyens financiers plus importants pour mener à bien leurs actions, elle n’est pas sans risques.

En effet, le financement public peut parfois s’accompagner de tentatives de contrôle de la part des pouvoirs publics, qui cherchent à orienter les actions des associations dans certaines directions.

Anne Bory souligne que cette tentation de contrôle est souvent plus forte dans les domaines d’action considérés comme prioritaires par les pouvoirs publics. Ainsi, les associations qui travaillent sur des questions liées à l’environnement ou à la santé peuvent parfois être soumises à des exigences spécifiques de la part des pouvoirs publics.

Cela peut se traduire par des demandes de résultats chiffrés ou d’actions précises, qui peuvent être contradictoires avec la mission et les valeurs de l’association.

Pour préserver leur indépendance, les associations doivent donc être capables de faire preuve de résistance face aux tentatives de contrôle de la part des pouvoirs publics. Pour cela, elles peuvent notamment s’appuyer sur leur histoire et leur expertise, mais aussi sur leur capacité à mobiliser leur réseau de partenaires et d’adhérents.

Anne Bory rappelle enfin que la question du financement des associations ne doit pas être considérée uniquement sous l’angle économique, mais aussi politique. En effet, le financement des associations est souvent lié aux choix politiques des gouvernements et peut avoir des conséquences importantes sur la vie démocratique du pays.

Dans ce contexte, il est important que les associations puissent préserver leur indépendance et leur capacité d’action, afin de contribuer pleinement au débat public et à la vie démocratique de notre société.